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Conditions d’achèvement

  1. HISTOIRE ET CONTEXTE SOCIO POLITIQUE


Il n'est pas possible d'envisager l'étude d'un Evangile sans préciser les circonstances historiques et sociétales  dans lesquelles se déroulent les événements rapportés afin de mieux les comprendre.


  1. Rappel historique


Après le règne du roi Salomon et depuis Jéroboam et Roboam, le Royaume d’Israël est divisé en deux états : Le royaume du nord ou Israël et le royaume du sud ou Juda. Une scission voulue par Dieu (1Roi12 :24) à cause de l'idolâtrie et de  l'abandon de la Tora par le peuple. Les deux royaumes vont connaître une histoire parallèle et chaotique dont voici quelques dates clés.

  • Entre -722 et -702. Le royaume du nord est anéanti, les dix tribus sont dispersées en Orient et en Afrique et ont aujourd'hui apparemment disparu …. jusqu'au jour où le Messie les ramènera dans le pays promis aux patriarches.

  • -586/-583, le royaume du sud, la Judée, occupée par la tribu de Juda, part en exil à son tour sous le roi de Babylone Nebucadnetsar. Pour mémoire, Siméon, une partie des Lévites (2 Chr 11 :13-15) et une partie de la tribu de Benjamin (1Roi12 :21) font partie du voyage. En fait il y a 3 vagues de déportation et Ezéchiel faisait partie de la première en - 597. Les prophètes Jérémie, Daniel, Aggée et Zacharie, connaissent aussi cet exil. 

  • -586 le temple de Salomon est détruit, Jérusalem rasée.

  • ≈ 50 ans plus tard, Zorobabel et le souverain sacrificateur Josué reviennent à Jérusalem pour reconstruire le temple. Cette reconstruction et ce retour, encouragés par le roi Cyrus, sont la démonstration que Dieu utilise les pensées des hommes pour satisfaire ses plans. En effet, une des motivations de Cyrus était d’installer entre lui et l’Egypte belliqueuse, un tampon traditionnellement ennemi de l’Egypte, le peuple d’Israël.

  • -458, Esdras revient à Jérusalem, le temple est reconstruit après de nombreuses péripéties.

  • -445, Néhémie, alors notable et échanson du roi Artaxerxès à Babylone, revient et reconstruit la muraille de Jérusalem.

Apportons quelques précisions :

En 537 avant J.C., les juifs qui étaient exilés à Babylone reviennent à Jérusalem sous l'impulsion du roi Cyrus. Ils sont en tout petit nombre à revenir car la majorité était bien intégrée dans les populations locales, même si tous n'avaient pas abandonné le Dieu de leurs pères, comme le raconte l'histoire de la reine Esther qui se déroule 50 ans après les premiers retours. En fait, sur les 200 000 juifs de Babylone, 49 697 au total rentrent en Israël.

Lorsque sous l'impulsion d'Esdras, de Zorobabel gouverneur de Judée, de Néhémie et des prophètes Aggée et Zacharie, ils arrivent dans le pays qui avait été promis à Abraham et sa postérité, ils y découvrent un pays ravagé et Jérusalem en ruine.

Le personnage clé de cette partie de l'histoire d'Israël est : ESDRAS.

Il faut retenir son nom car les décisions qu'il prendra vont avoir un e influence déterminante dans la situation d'Israël au temps de Jésus.

Shéma


  1. Schéma d'Abraham à Esdras

Pour avoir une vision globale de l’histoire, il faut être synthétique et donc réducteur. De ce fait le schéma suivant qui s’inscrit dans cette logique, ne peut apporter que des bribes d’éclaircissement d’une réalité bien plus complexe.

Il faut remonter à Abraham



  1. Esdras et l'identité juive


Il est celui qui est appelé d’une terre lointaine pour accomplir les desseins de Dieu (Ez 20 :39-44). 

La mission/vocation d’Esdras peut être résumée en deux finalités principales :

Rétablir, avant la venue du Messie, le culte de l’Éternel qui était finalement quasiment abandonné au temps des rois, à part quelques sursauts spirituels sporadiques et éphémères.

Et permettre à un petit nombre d’être” gardiens de la Tora “ au travers des millénaires, malgré les épreuves et les persécutions qui ne manqueront pas de l'atteindre.

Lorsqu'ils arrivent à Jérusalem, la situation des hébreux est catastrophique. La terre est ruinée, ils sont entourés de gens qui les haïssent et surtout, ils ne sont qu'un tout petit nombre.

Les hébreux et surtout les notables de Babylone financent le retour de Zorobabel et Esdras, mais ne reviennent pas eux-mêmes, car ils sont bien accueillis chez les assyriens et les chaldéens. Ils font du commerce et comme Néhémie, ils ont des situations enviables, ce qui déjà, suscite des jalousies des autochtones selon un processus bien connu … Un deuxième danger très grave menace le peuple hébreu, Israël :   l’assimilation par la culture grecque, qui séduit une grande partie de l’Élite d’Israël.  Jusqu’à Esdras en tout cas, Israël a tendance à épouser les dieux des pays où il séjourne. (cf. Ezéch20).

ESDRAS, homme remarquable, « grand maître » ou « homme magnifique » selon les expressions qui lui sont consacrées dans la littérature, est bien conscient de tout cela.

Poussé par Dieu, cet homme intègre qui aime la Tora plus que sa propre vie, va réagir pour sauver Israël du danger de son assimilation et donc de sa disparition.

Un danger omniprésent durant les 2500 ans qui vont suivre mais qui sera évité grâce à un plan parfait suscité par Dieu : Esdras le mettra en place , en perspective des temps à venir…

Que fait Esdras ?

L'idée globale pour lutter contre l’assimilation du peuple Saint, c’est de lui donner une identité forte.


Tout d'abord, il faut trouver un nom. 


Le nom est une marque incontournable et déterminante de l’identité. Mais quel nom donner à ce petit reste d'exilés ? Celui d'Israël, Israélien, Israélite paraît être le plus évident. Esdras ne le retient pas parce que Juda a eu de nombreux démêlés avec son voisin, le royaume d’Israël. Son premier roi Jéroboam rejette le culte de l'Eternel et le remplace par deux veaux d’or adorés sur des hauts lieux, il change de son plein gré les dates des fêtes, ses prêtres sont nommés par le politique et ont des pratiques idolâtres abominables. Dans ce contexte, et même si le royaume du nord a disparu, comment nommer ce petit reste de Juda fidèle à Dieu, pour les différencier des nations ? Esdras est judéen, Jérusalem est en Judée, le royaume de Juda habite en Judée et en hébreu la Judée ou Juda 


se dit "iéouda" ( יהודה ) de là à nommer les habitants de la Judée "iéoudi" ( יהודי ) c’est-à-dire " les juifs" il n’y a qu’un pas . Esdras désignera ainsi ceux qui habitent Jérusalem et ses alentours (Néhémie 7 :61). Juda, Judée, Juif c'est désormais leur nom qui désignera plus qu'une religion, ce sera une marque identitaire forte.

Cela explique aussi pourquoi nous trouvons dans la Tora, ou pentateuque , de très nombreuses mentions du nom « d’Israël » et jamais celui de « Juif ». Le nom de "Juif" ne viendra donc que très longtemps après le don de la Tora.

Aujourd’hui on ne parle que de « juifs », le nom d'Israël désignant une nation, un état politique et géographique. 

Dans le Tanakh, AT , pour mémoire, déterminé et arrêté par Esdras, on trouve le mot « juif » 77 fois.

Cependant, le mot « Israël » se retrouve 2253 fois. On le retrouve 45 fois dans Esther (écrit par Esdras et/ou ses collaborateurs, comme sans doute le livre des rois et le livre de Néhémie) ; 11 fois dans Jérémie, 2 fois dans les livres des Rois, 1 fois dans Zacharie, 2 fois dans Daniel qui sont tous contemporains d'Esdras et 16 fois dans Esdras et Néhémie. 


Que fait Esdras ensuite ? 


  • Un autre facteur déterminant de l'identité après le nom, c'est l'histoire. Or l'histoire des juifs est liée à l'histoire d'Israël qui est connue et extrêmement importante. Cette histoire est révélée par la Tora qui est écrite et répandue mais aussi par le livre des Rois qui de l'avis des historiens a été finalisé par Esdras et ses disciples.

  • Pour forger cette identité préservatrice, Esdras élabore et rédige la liturgie judaïque inspirée de la loi et les prières qui sont toujours en vigueur aujourd'hui dans le judaïsme.

  • Il encourage l’interprétation de la loi et ce que l’on appelle la loi orale qui deviendra plus tard le Talmud

  • Il met en place les synagogues qui sont au centre de la communauté juive et dont la finalité première et non unique est l’enseignement.

  • Il crée l’académie des 120 sages (Knesset Guedola ou Grande Assemblée) qui deviendra le sanhédrin qui jouera un rôle si important dans l'arrestation de Jésus et sa condamnation.

  • Apparition dans cette période de différents courants spirituels judaïques proches mais ayant des perceptions différentes de l’application de la loi dont les Pharisiens, les sadducéens, les Scribes (au statut un peu particulier), les Esséniens qui deviennent les gardiens de l'application des rites cultuels.

  • Les pharisiens deviendront dominants et c’est à la suite d’Esdras et suivant son exemple qu’ils vont continuer à fixer le culte, les rites, les coutumes jusqu’à l’excès ; ce qui fera dire à Jésus qu’ils annulent les saintes écritures par leurs traditions (Mat 15:6).



  • C'est lui enfin qui fixe définitivement les livres du canon sacré ou "tanakh", ce que nous appelons Ancien Testament, qui constitue la plus grande partie de notre Bible.


Le dernier prophète reconnu dans l'Ancien Testament est Malachie qui écrit en -397 et donc 400 ans séparent les dernières pages de l'Ancien Testament des premières du Nouveau Testament.

Entre Malachie et Jean Baptiste qui est en réalité le dernier prophète de la première alliance, il se passe 430 ans. Pourquoi un si long silence ?  S’y produisent pourtant des événements importants dont la fin des anciens royaumes Perses et Chaldéens qui se voient bousculés par l'émergence de deux nouvelles entités opposées et pourtant complémentaires, la Grèce et Rome.

Elles dominent le monde encore aujourd'hui : la Grèce avec ses penseurs, ses philosophes et ses scientifiques forgeront une mentalité nouvelle en opposition constante avec l'Évangile. Rome, symbole de la force militaire et de l'organisation rationnelle, associée à la pensée grecque et à l’épicurisme va partir à la conquête du monde connu en privilégiant l'assimilation à la destruction ; stratégie bien plus efficace que toutes celles des royaumes précédents.

Une fois encore, c'est aveuglés par la peur de cette assimilation, que les pharisiens et le sanhédrin prennent une décision plus politique que spirituelle : rejeter Jésus. Celui qui dit qu'il faut rendre à César ce qui est à César va être considéré comme poussant à pactiser avec l'ennemi romain.

Cependant il fallait que ce temps soit accompli….. La Parole de Dieu dit : "Lorsque les temps ont été accomplis, Dieu a envoyé Son Fils... " (Ga 4:4) ;  c’est le récit des 4 évangiles.


  1. Contexte politique et sociétal au temps de la vie de Jésus


-334, Fin de l'empire perse. Alexandre de Macédoine dit Alexandre le Grand bat le roi de Perse, Darius. Il soumet la Syrie et entre à Jérusalem. C'est le début de la domination grecque. Après une histoire très mouvementée et pendant 122 ans, les Juifs furent gouvernés par leur souverain sacrificateur, assujetti lui-même au roi d’Égypte. À cette époque, on fit à Alexandrie en Égypte la traduction grecque des Saintes Écritures hébraïques dite des Septante.

Dans le même temps, les Syriens soutiennent ceux des Juifs qui essaient d’helléniser la Judée, et s'efforcent même d’imposer l’idolâtrie à Israël. La tyrannie sacrilège des Syriens devient intolérable aux juifs pieux, qui se révoltent sous la conduite des Maccabées (nom d’une famille juive appelée aussi Asmonéens), en 166 avant Jésus-Christ. Cette révolte débouche sur une période d’indépendance sous les Maccabées, qui étaient à la fois souverains sacrificateurs et rois. Cette ère de liberté dura de 166 à 63 avant Jésus-Christ, date de la prise de Jérusalem par Pompée. En 40 avant Jésus-Christ le sénat romain confère la royauté à Hérode le Grand qui commence son règne en prenant Jérusalem, en 37 avant Jésus-Christ. Les Pharisiens et les Sadducéens, partis officiellement reconnus, exercent alors une grande influence politique et religieuse. C'est l’époque de la domination romaine qui va durer toute la vie de Jésus et même au-delà.

La Galilée sous la domination romaine. Les autorités romaines délèguent la gestion des provinces conquises à des personnages d'origine locale qui leur sont entièrement soumis. C'est le cas d'Hérode le Grand qui est préfet de Galilée et dirige cette région. Son fils Hérode Antipas gouverne cette région de l'an -4 à 39. Jésus-Christ comme Jean Baptiste vivront sous sa juridiction. 

La Judée sous la domination romaine. Ponce Pilate est romain. Il est nommé préfet de la Judée et réside à Césarée une ville hellénisée. Son titre de préfet et non de simple procurateur, impliquait une autorité militaire, administrative et juridique. Jérusalem est sous sa juridiction. C'est un homme 


mondain, disposé à juger selon la justice, à condition de n’en subir aucun préjudice personnel. Prêt à commettre un crime rémunérateur, il ne s’inquiète pas de son devoir, mais seulement de ses intérêts. Et c'est ainsi qu'il permet la crucifixion de Jésus pour plaire aux religieux juifs. Sa fin sera dramatique puisqu'en +37 il est exilé en Gaule où il se suicide.


  1. INTRODUCTION GÉNÉRALE DES ÉVANGILES    


PRÉSENTATION DES QUATRE ÉVANGILES

Evangile signifie "bonne nouvelle". Cette bonne nouvelle, c'est la venue du Messie, Jésus-Christ. (Mc1:1, Ro1:1-3). A la vérité, il n'y a pas quatre bonnes nouvelles, mais une seule : Christ en est le centre.

Les quatre évangiles sont complémentaires et présentent le Christ sous quatre aspects différents qui nous rappellent les quatre êtres vivants du livre d'Ezéchiel 1:8 et de l'apocalypse 4:7 : "Le premier être vivant est semblable à un lion, le second être vivant est semblable à un veau, le troisième être vivant à la face d’un homme, et le quatrième être vivant est semblable à un aigle qui vole". 


  • Matthieu s'adresse aux juifs et donc présente Jésus comme un Messie roi successeur de David. Ce qui nous rappelle le lion de la tribu de Juda.

  • Marc s'adresse au monde idolâtre dominant de l'époque et présente Jésus comme un serviteur, ce qui nous fait penser symboliquement au bœuf ou veau

  • Luc est un médecin et il s'adresse plus particulièrement au monde Grec et il rend compte scrupuleusement de l'humanité parfaite de Jésus le fils de l'homme. Apoc 4:7

  • Jean présente la divinité de Jésus. Il est Fils de Dieu ; Dieu lui-même manifesté aux hommes pour donner sa vie dans un sacrifice expiatoire parfait. C'est l'aigle.


Aucune "Harmonie des 4 Evangiles" n'a jamais donné satisfaction. Chaque récit est un monde en soi ; chaque Évangile est un portrait ayant sa physionomie propre ; néanmoins les quatre sont nécessaires à la pleine révélation du Seigneur.

Chaque écrivain vise, non à écrire une biographie complète, mais à atteindre un but spirituel très précis, répondant à un besoin précis. Pour ce faire, il met l'accent sur tel ou tel fait et laisse délibérément dans l'ombre ce qui n'est pas nécessaire à son dessein particulier. Ainsi, Jean l'évangéliste présente essentiellement le Fils de Dieu. Il n'y a pas de récit de la naissance de Jésus, ni de la tentation, ni du combat de Gethsémané ; Matthieu, axé sur la royauté du Seigneur, est le seul à relater la visite des mages qui disent : "Où est le roi des Juifs" ?

D'une façon générale, les écrivains n'ont pas suivi l'ordre chronologique. Ils accordent la priorité au message à transmettre plutôt qu'à la rigueur du calendrier. Mais chacun d'eux consacre environ un tiers de son récit à la mort et à la résurrection du Seigneur. 


L'Evangile selon Jean diffère sensiblement des trois premiers appelés les synoptiques (même optique) à cause de leurs ressemblances.

PORTRAIT DES QUATRE ÉVANGÉLISTES 


Matthieu, appelé aussi Lévi fils d'Alphée est un homme discret qui ne parle pas de sa rencontre avec Jésus, qui ne dit pas que c'est lui qui fit un festin à Jésus pour fêter son appel à Le suivre. Il se décrit comme un publicain  rejeté par le peuple du fait qu'il travaille pour l'envahisseur romain.

Son Evangile est en tête du Nouveau Testament. Aucun livre ne pouvait mieux établir le lien entre la première et la nouvelle Alliance. -Dieu en effet, a mis au cœur de Matthieu d'écrire premièrement à l'intention des fils d'Israël, afin de certifier au peuple juif que Jésus est effectivement le Messie, c'est-à-dire le Roi-Oint annoncé par l'A.T. Á cet effet, il cite abondamment les Écritures répétant sans cesse l'expression : Ceci arriva afin que s'accomplit ce qui avait été annoncé... (Environ 60 références à l'Ancien Testament.).

Matthieu parle plus que tout autre de la nature du Royaume fondé par le Messie et du caractère des membres du Royaume. Il se peut même -d'après les écrivains anciens- que Matthieu ait d'abord rédigé son récit en hébreu avant de le traduire en grec. Le texte hébreu aurait disparu. 


Marc, ou Jean-Marc, auquel est attribuée la rédaction du deuxième Évangile, est mentionné pour la première fois en Act 12:12. Il accompagne Barnabas, son cousin (Col 4:10) et Saul, de Jérusalem à Antioche (Ac 12:25), puis participe à leur première entreprise missionnaire (13:5). Sa défection, en Pamphylie (13:13) n'est pas acceptée par Paul et devient la cause de séparation des deux amis (15:38-39).

Après un temps de service au côté de Barnabas à Chypre, Jean-Marc est mentionné comme aide de Pierre à Babylone, au moment où celui-ci écrit sa première épître. Pierre l'appelle son fils (1 Pi 5:13).

Nous le retrouvons ensuite à Rome. De bonnes relations se sont établies entre lui et Paul qui l'appelle "compagnon de service" (Col4:10; Phm 24). Enfin, lors de sa dernière captivité, Paul souhaite l'avoir auprès de lui et demande à Timothée de le lui amener (2 Ti 4:11). C'est tout ce que nous savons de Marc par l'Écriture.

Les écrivains anciens s'accordent à dire qu'il était le secrétaire-interprète de Pierre à Rome. Son Evangile -écrit sur la demande de beaucoup- serait le reflet de tout ce qu'il aurait entendu de la bouche de l'apôtre dans ses nombreuses et toutes simples prédications ; il les aurait rapportées sans rien modifier.

Marc s'adresse à des lecteurs qui connaissent peu les Ecritures, aussi ne les cite-t-il que rarement. Ils ignorent aussi les coutumes juives, il doit donc les expliquer (7:3-5). Il utilise de nombreuses expressions en araméen  (5:41; 7:34). Il mentionne Simon de Cyrène (15:21) et ajoute qu'il est le père d'Alexandre et de Rufus, deux croyants de Rome (Ro. 16:13) où Marc rédige son Évangile.

On en a conclu que Marc écrit premièrement à l'intention des Latins et des Romains. Le Sauveur apparaît dans son livre avant tout comme le parfait serviteur de Dieu, toujours au travail, obéissant jusqu'à la mort, modèle divin que Pierre avait sans cesse à l'esprit.



Luc, médecin, considéré comme l'auteur de l'Evangile et des Actes des apôtres, est le seul écrivain de la Bible qui ne soit pas Juif. Il n'est pas témoin oculaire de la vie de Jésus il fait "œuvre d'historien".

Grec d'origine, d'éducation et de mentalité, la tradition le dit être d'Antioche, ce qui est vraisemblable. C'est là qu'il aurait cru en Christ, se serait joint à l'Église où il aurait fait la connaissance de Paul et subi son influence. Luc apparaît -pour la première fois en Ac16:10, à Troas. Il accompagne Paul, Silas et Timothée, de Troas à Philippes. Il semble qu'il soit resté dans ces contrées un certain temps pour affermir les croyants pendant que Paul et ses compagnons poursuivaient leur voyage en direction de la Grèce.

Le mot "nous" qui l'associe aux pérégrinations de Paul et de ses compagnons reprend en Actes 20:6, précisément à Philippes. Dès lors Luc est le compagnon constant de Paul jusqu'à la fin du livre des Actes. A Césarée, il est de ceux "qui lui rendent des services" pendant les 2 ans de son emprisonnement (Ac24:23). Puis il écrit un remarquable récit pathétique du voyage jusqu'à Malte et Rome, sans jamais parler de lui.

Il est encore au côté de l'apôtre pendant sa première captivité ou résidence forcée à Rome (Col4:14; Phm 24). Enfin lorsque Paul est prisonnier pour la seconde fois, il est abandonné de tous, seul Luc est avec lui : "Luc seul est avec moi", (2Tim4:11).

Luc, par son origine, son éducation et son contact de longue durée avec Paul, était l'instrument préparé par Dieu pour présenter l'Homme parfait, Jésus, au monde grec d'alors, monde épris de civilisation, de recherche de la sagesse, de la logique et de la beauté. 

Selon les habitudes du monde grec, son ouvrage est dédié à un homme de quelque importance, ici “ Son Excellent Théophile”, probablement un notable d'Antioche, pour l'affermissement personnel de sa foi, et aussi -peut-on supposer-- parce qu'il était disposé et en mesure de prendre à sa charge la tâche coûteuse de  faire copier et répandre cet Evangile.


Les synoptiques ont été rédigés avant la destruction de Jérusalem par Titus, en 70 , alors que les premières lettres de Paul sont écrites dès l'an 50 pour l'Epître aux Galates. La tradition rapporte que Jean écrivit beaucoup plus tard (après l'an 90), et avait probablement connaissance des trois Évangiles déjà répandus. Il évite de les répéter. Apoc1:9 nous informe qu'il était à Patmos, probablement en résidence forcée.

Derniers témoins des temps apostoliques, les écrits de Jean (Evangile, Épîtres et Apocalypse) sont aussi les derniers du Nouveau Testament à être rédigés. Ces écrits couvrent une très longue période puisque Jean débute son Évangile par "au commencement" et finit l'Apocalypse par l'attente de la venue du Messie qui revient pour régner dans Sa gloire éternelle.


Jean, le disciple que Jésus aimait.

En réalité le nom de Jean n'est pas mentionné dans le quatrième évangile et c'est la Tradition et les historiens bibliques qui attribuent à Jean la rédaction de ce magnifique texte.



Jean est le frère de Jacques son ainé et ils sont fils de Zébédée (Mat 10:2-4). Jésus les surnomme : "Fils du tonnerre" (Marc 3:17). Il est très certainement l'auteur des Epîtres qui portent son nom ainsi que de l'Apocalypse qu'il rédige à Patmos. La rédaction de l'Évangile est tardive, entre les années 80 et 90 après J.C. L'Apocalypse ayant été écrite en dernier autour de l'an 95.

L'Évangile de Jean présente trois grandes vérités : 1° Jésus est la Parole de Dieu, le Messie est le fils de Dieu. 2° Jésus offre le don du salut à l'humanité. 3° Celui qui accepte l'offre de salut est sauvé et celui qui la refuse va vers le châtiment éternel. 

Le texte est écrit en termes clairs, simples et très accessibles à tous et pourtant il est d'une profondeur extrême.  Jésus y affirme à plusieurs reprises et très clairement qu'il est Dieu (Jn 14:7-11), à 7 reprises il emploie l'expression "Je suis" (6:35 ; 8:12 ; 10:7,9 ; 10:11,14 ; 11:25 ; 14:6 ; 15:1-5. Cp.Ex 3:14). C'est aussi dans cet Évangile qu'est révélé le mystère du Consolateur qui doit venir (Jn 14,15,16) et enfin ce merveilleux moment dans le temple de Jérusalem, où Dieu le Père désigne Jésus comme l'agneau de Dieu (Jn 12:28) qui sera sacrifié quelques jours plus tard à l'heure même où tous les agneaux de Pâque- Pessah y sont immolés (Jn 19:14).

En Jean sont mentionnées trois fêtes de Pâque-Pessah au cours du ministère du Seigneur : Jn 2:13,  6:4 et 11:55 et 13:1. Ce sont ces trois mentions de Jean qui permettent d'affirmer que le ministère du Seigneur a duré environ trois ans. Les synoptiques ne nous fournissent aucune information de ce genre. En Jean, le ministère de Jésus se déroule essentiellement en Judée et à Jérusalem. On y trouve au moins cinq visites à Jérusalem (Jn 2:13; 5:1; 7:10; 10:22; 12:12). Les mentions de son activité en Galilée sont relativement rares. Au contraire, les synoptiques accordent une large place au ministère en Galilée d’abord puis à Jérusalem.

En outre, Jean commence le récit des activités du Seigneur à leur début, alors que Jean-Baptiste prêchait encore et baptisait au bord du Jourdain (Jn 3:22-23; 4:1-2). Les synoptiques, après avoir mentionné le baptême de Jésus et la tentation, passent sous silence la période où Jean-Baptiste et Jésus témoignent simultanément au bord du Jourdain. Ils décrivent plutôt les œuvres du Seigneur en Galilée, après l'arrestation de Jean-Baptiste. Voir Mt4:12; Mc1:14; Lu3:20; 4:14.


  1. LES SPÉCIFICITÉS DE L'ÉVANGILE DE LUC


L'évangile de Luc est composé de 24 chapitres et 1149 versets (Marc en contient 661). Sur le plan littéraire, Luc est certainement le plus doué des évangélistes. Il connaît admirablement la langue grecque et sait la manier avec aisance et s'adapte à un auditoire grec, sensible à l'élégance et la beauté de la forme.

N'étant pas témoin oculaire, Luc fait œuvre d'enquêteur et d'historien affirmant s'être informé soigneusement… Et c'est ce qui ressort de son texte où effectivement il peut proposer à ses lecteurs un récit dont les 2/5ième ne se lisent ni en Marc ni en Matthieu et ce sont souvent les plus belles pages de son Évangile. 


Parmi les insertions qui ne se retrouvent pas ailleurs on relève :


  • Les récits de l'enfance – La résurrection du fils de la veuve de Naïn – 3 récits de guérisons miraculeuses – La pécheresse pardonnée et aimante – L'entourage féminin de Jésus – L'accueil des samaritains – La mission des 70 disciples – Marthe et Marie – La mère de Jésus – Enseignement sur la pauvreté – Hérode, le renard – La visite chez Zachée – Enseignement sur la prière – Paraboles de la drachme, l'enfant prodigue, l'ami grincheux, le bon samaritain, mauvais serviteur, figuier stérile, le serviteur inutile, le juge inique, le pharisien et le publicain, les paroles du festin, la tour et la guerre.

Cependant on ne retrouve pas certains récits qui se trouvent chez Marc et Matthieu :

  • Il omet ce qui n'est pas susceptible d'intéresser les lecteurs issus du paganisme, comme les discussions sur les traditions pharisaïques (le retour d'Elie) et les récits qui auraient suscité des difficultés théologiques (l'imposition de la salive de Jésus). Les récits qui auraient pu faire doublon avec le récit de Marc également sont écartés.


L'Évangile de Luc est tout de grâce et de beauté. 


Le Messie qu'il présente n'est ni un maître qui enseigne avec autorité, accomplissant les Ecritures, ni un rabbi aux traits humains. Il est Le Seigneur qui séduit les âmes par sa noblesse et sa beauté et par la splendeur de son message divin. Luc souligne en Jésus la perfection humaine que l'âme grecque rêvait de trouver en un homme idéal.

Ainsi, Luc délaisse les passages où Jésus est profondément affecté : 

  • Le frémissement à la vue du lépreux – sa tristesse devant l'endurcissement des cœurs – son indignation contre les apôtres – le récit de la passion, ici considérablement allégé – la désolation de la scène de Gethsémané ici adoucie – il omet les insultes de la foule, la flagellation, le couronnement d'épines ainsi que les sentences très dures du Seigneur lorsqu'il parle par exemple des chiens et des pourceaux ou encore les eunuques volontaires etc.

En fait, Luc choisit de souligner le caractère infiniment attachant de celui à qui la beauté divine appartenait en propre, transformant sa nature humaine par l'éclat de sa divinité. Il semblerait qu’il décrit le nouvel Adam, celui d'avant la chute…

Luc traite les disciples avec beaucoup d'égards et de déférence jusqu'à omettre les traits qui ne lui paraissent pas en harmonie avec le titre d'apôtre qu'il leur donne souvent.


L'Évangile de la joie messianique. Alors que Matthieu est grave et que Marc ne mentionne qu'une seule fois la joie, Luc emploie souvent les mots suivants : joie, allégresse, tressaillir d'allégresse, se réjouir, annoncer la bonne nouvelle. Il insiste sur la Joie Messianique qui transparaît dans le récit de l'enfance et dans chaque page de son Évangile.

L'Évangile de la louange envers Dieu. Il rapporte précisément la louange de Marie, de Zacharie, de Siméon, le chant des anges. Il montre la foule en liesse qui rend gloire à Dieu.




L'Évangile des grands pardons. Il souligne particulièrement le Dieu incarné qui vient sauver les hommes, le mystère de l'amour de Dieu pour les hommes pécheurs : - Venu chercher ce qui était perdu – appelle les pécheurs à la conversion – pardonne la femme pécheresse – élève le publicain 


qui s'humilie et abaisse le pharisien orgueilleux – entre chez Zachée le pécheur – prie pour ses bourreaux – promet le paradis au brigand sur la croix –.

L'Évangile de la prière. Matthieu et Luc accordent une importance particulière au thème de la prière. Luc insiste spécialement sur la vie de prière de Jésus qu'il montre avec insistance notamment dans les étapes importantes du ministère messianique : baptême, avant le choix des douze, avant la profession de foi de Pierre, transfiguration, avant d'enseigner le "notre Père", à Gethsémané.

L'Évangile du renoncement pour suivre Jésus. Comme aucun autre, Luc met en avant la nécessité du renoncement pour suivre Jésus et surtout du dépouillement libérateur : - Les premiers disciples ont tout quitté – prendre sa croix chaque jour – renoncer à tous ses biens – préférer l'amour de Jésus à l'amour des siens. Puis il insiste particulièrement sur l'importance de donner aux pauvres qui sont proclamés "heureux".

Nul n'insiste plus que lui sur les dangers de la richesse ; ainsi il évoque cette problématique 11 fois alors que Matthieu 3 fois et Marc 1 fois.

L'Évangile de la présence féminine. Le milieu juif de l’époque n'accordait aux femmes qu'une considération très mesurée. Dans l'Évangile de Luc au contraire, les femmes élèvent la voix du milieu de la foule, elles chantent le Dieu-sauveur, elles accompagnent Jésus sur les routes. Á 14 reprises, elles ne sont pas simplement mentionnées mais elles ont un rôle central dans le récit de Luc.


ANNEXE 1


Pourquoi Dieu appelle-t-il un peuple ? Et pourquoi sauve-t-il ce peuple malgré ses infidélités ?  

Premièrement parce que Dieu est fidèle (Psaume 118 et 136 ; Ps 105 :8-10) et qu’il aime Israël postérité d’Isaac (Gen 21 :12 ; Esaïe 41 :8 ; 1Roi10 :9). Il est fidèle à l'alliance et aux promesses faites à Abraham, Isaac et Jacob.

Ensuite, parce qu’il faut qu’Israël accomplisse la mission pour laquelle Dieu l’a appelé, à savoir :

  • engendrer le Messie (Michée 5 :1)

  • assumer la rupture avec l’Évangile de la grâce en rejetant le Messie afin que cet évangile soit prêché secondairement aux nations, ce qui est sa mission originelle

  • posséder Jérusalem qui est la ville de l’Éternel (Esaïe 52 :1 ; Ps87 :1-3) et où Jésus posera les pieds lors de son retour pour régner en Roi (Deux dates clés : 1948 et 1967)

  • accueillir le Messie-Roi dans sa ville, Sion/Jérusalem, au milieu de l’Israël de la promesse, l’Israël de la Tora qui dira « béni soit celui qui vient au nom du Seigneur » (Psaume 118 :26 ; Mat 21 :9 ; 23 :39 ; Mc11 :9 ; Lc13 :35 ; Jn12 :13)

  • être une pierre d’achoppement pour les nations afin que les cœurs se révèlent (Zach 12 :3)

  • être la démonstration de la justice de Dieu (Habakuk 1 :12)

  • mais aussi être la démonstration de la grâce et de la bénédiction de Dieu malgré tout, car de nombreux peuples bien moins maltraités qu’Israël au cours des siècles ont totalement disparu.

  • et aussi être la démonstration de la fidélité de Dieu (Ps 118 et 136)

  • être, lors de la venue du « Roi », le guide des peuples (Zach 8 :23).



Modifié le: lundi 15 mai 2023, 22:36